Le silence, un élément essentiel de l’écoute empathique
Par Coach Virginie Mesana
Cet article, basé sur une anecdote personnelle et une histoire de coaching, est une illustration de la puissance du silence et de l’importance de l’écoute empathique pour développer une meilleure qualité de relation à l’autre.
Il y a quelques années déjà, fraîchement sortie de ma formation de coaching, j’attendais fébrilement l’appel d’un de mes clients. Je décroche à la première sonnerie, mais au bout du fil la voix est loin d’être aussi enjouée que la mienne. En fait, je détecte même un essoufflement, une brisure. L’annonce ne tarde pas à tomber. « Je viens d’apprendre que mon père est décédé. Je ne crois pas que je vais pouvoir être coaché aujourd’hui ». La nouvelle me fend en deux. Quelle horreur. Bien sûr que ce n’est pas le moment d’avoir une séance de coaching! Après avoir offert à mon client mes sincères condoléances et lui avoir assuré mon soutien pour surmonter cette épreuve, nous mettons rapidement fin à l’appel.
Une semaine passe et mon coaché m’envoie un courriel. « Virginie, penses-tu que tu pourrais me coacher autour de mon deuil ? » Dans un premier temps, je ne sais pas quoi répondre. Je n’avais jamais imaginé coacher autour de telles problématiques. Lors de la première séance, nous avions plutôt parlé d’aborder des croyances limitantes comme la peur de l’échec et de l’accompagner dans le passage à l’action et dans la prise de décisions. Comment m’assurer de ne pas tomber dans la psychothérapie ? Peut-on vraiment coacher autour du deuil ? Comment pourrais-je gérer mes propres émotions pour être pleinement là pour lui? Après réflexion, je propose à mon client de planifier un court appel pour en parler de vive voix et voir comment il imagine le coaching l’aider avec ce qu’il vit.
Dès le départ, il me précise : « Je ne cherche pas une thérapie. J’ai besoin de te parler pour trouver des manières de vivre avec ma souffrance. Et pour réfléchir à comment rendre hommage à la mémoire de mon père. À ma manière. » Il s’ensuit l’une des plus belles séances de coaching que j’ai eus dans ma carrière. Une conversation honnête, ouverte, ponctuée de silences dans lesquels mon coaché apprivoise sa peine.
Au lieu de chercher le bon mot et de meubler ses silences, je leur donne toute leur place pour exister.
L’écoute empathique passe véritablement par une intention d’offrir de la compassion, autrement dit d’offrir une qualité d’écoute à l’autre qui peut s’exprimer librement et à son rythme. C’est une présence où on accueille toutes les parties de l’autre, en même temps qu’on accueille toutes les parties de soi. Nous créons ensemble un dialogue authentique dans lequel on apprend à être confortable avec les silences et à accepter de ralentir pour vraiment entrer à l’intérieur de soi.
J’accueille les larmes qui coulent, les soupirs et les sourires aussi. Ce sont dans ses non-dits, dans l’absence de ses mots, dans son souffle, dans ses pauses, que se dessine peu à peu le courage de poursuivre, de me parler de lui, son père, et de comprendre la voie qu’il lui faut maintenant emprunter.
Nous avons eu de nombreuses conversations depuis ce premier jour. Les silences ont cédé la place aux récits, au partage et à une créativité insufflée par l’amour pour trouver mille façons d’honorer sa mémoire.
Aujourd’hui, je sais que coacher autour du deuil est non seulement possible mais ce fut surtout l’un des apprentissages les plus puissants de ma vie.
Apprendre à être là pour l’autre tout simplement.
Apprendre à être là pour l’autre tout simplement. Dans le silence et dans l’écoute totale. Donner à l’autre tout l’espace sans essayer de trouver les solutions pour lui, sans prendre sa place, sans dire ses mots.
Aujourd’hui lorsque l’envie d’intervenir survient au lieu d’écouter, ou quand je suis pressée d’agir au lieu de ralentir, je repense toujours à ce précieux moment et au cadeau que ce coaché m’a fait de comprendre que parfois le silence est plus fort que les mots.
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*Pour en savoir plus sur l’écoute empathique, également appelée « écoute bienveillante », je vous invite à consulter les travaux de Carl Rogers qui est un des pionniers de cette approche. Voir son livre : « Le développement de la personne ».